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Splendeurs et misères. Images de la prostitution 1850-1910

Musée d'Orsay

22 septembre 2015 - 17 janvier 2016

Affiche de l’exposition
Henri de TOULOUSE-LAUTREC, Au moulin rouge, 1893-1895, huile sur toile,

123 x 141 cm, The Art Institute of Chicago, Chicago

Table des matières

INTRODUCTION

I. UNE EXPOSITION CHRONO-THÉMATIQUE

A/ UN AXE CHRONOLOGIQUE OU L’ÉTUDE D’UNE SOCIÉTÉ 

B/ UN AXE THÉMATIQUE AU TRAVERS DE LA SCÉNOGRAPHIE 

C/ LES PROSTITUTIONS ET LES ARTS : LA NOUVEAUTÉ À L’ÉPREUVE 

II. PHOTOGRAPHIE ET CINÉMA : DEUX NOUVEAUX MÉDIAS AU SERVICE DE LA PROSTITUTION

A/ LES PREMIERS PAS DU CINÉMA ET DE LA PHOTOGRAPHIE : UNE ÉVOLUTION SOUS LES AUSPICES DE LA PROSTITUTION

B/ DE LA PROSTITUTION À LA PORNOGRAPHIE : NAISSANCE D’UN MARCHÉ LUCRATIF AU MILIEU DU XIXE SIÈCLE 

C/ UNE EXPLORATION SCÉNOGRAPHIQUE DES MŒURS 

III. UNE « REFLEXION SOCIETALE » RETROSPECTIVE : QUELLES POSITIONS DE LA FEMME AU FIL DU XIXE – XXE SIECLES ?

A/ LES SUBTERFUGES DE LA PROSTITUTION : L’APPRENTISSAGE DES CODES POUR LE SPECTATEUR CONTEMPORAIN

B/ LA QUESTION DE LA PLACE DE LA FEMME AU TRAVERS DU REGARD MASCULIN

C/ UN SUJET D’ACTUALITÉ SUSCITANT TOUJOURS DE VIFS DEBATS 

CONCLUSION

ANNEXE FILMIQUE : Bertrand Bonello, L'Apollonide : souvenir de la maison close, 2011

SOURCES

INTRODUCTION

Splendeurs et misères. Images de la prostitution 1850-1910est la première exposition en son genre à traiter de la prostitution en général, c’est-à-dire qui explore sur une période riche du point de vue historique et artistique la femme – objet de fantasmes – liée à la vision hégémonique de l’artiste masculin renouvelant son répertoire en quête de sujets, de formes et de couleurs inédites, puisant de cette manière dans la misère humaine[1]. Empruntant son titre au fameux ouvrage Splendeurs et misères des courtisanesde Balzac paru en 1838, l’exposition ne souhaite pourtant pas restreindre la vision de la prostitution aux hautes sphères de la société. Cette exposition audacieuse applaudie par les autres institutions culturelles étrangères a vu le jour grâce à l’association de quatre commissaires d’exposition provenant d’horizons différents mais fusionnant leurs connaissances pour donner à la représentation de la prostitution une réflexion contemporaine et éducative qui s’exportera jusqu’au Van Gogh Museum d’Amsterdam sous le titre Easy Virtue: Prostitution in French Art, 1850-1910. 

Expert de l’art français du XIXe siècle, membre du conseil scientifique et ami du Musée d’Orsay, Richard Thomson apporte un regard étranger à Splendeurs et misères. Il a aussi supervisé trois expositions dont une en France sur Henri de Toulouse-Lautrec (artiste habitué des maisons de tolérance) en 1992 au Grand Palais à Paris. Nienke Bakker fait le lien entre le Musée d’Orsay et le Van Gogh Museum. Conservatrice à Amsterdam, elle collabore néanmoins avec le Musée d’Orsay une première fois en 2014 lors de l’exposition Van Gogh / Artaud. Le suicide de la sociétéet se charge de la suite de Splendeurs et misèresau Van Gogh Museum. Marie Robert enrichit quant à elle l’exposition grâce à sa maîtrise du médium de la photographie : elle est conservatrice depuis 2011 au Musée d’Orsay des collections photographiques et participe à la deuxième partie de l’exposition Qui a peur des femmes photographes ?(1918-1945) présente dans l’ancienne gare. Les femmes et la photographie sont donc à l’honneur de cette rentrée culturelle. Enfin Isolde Pludermacher qui a donné de nombreuses interviews à la presse culturelle est conservatrice des peintures au Musée d’Orsay depuis 2012. Ses travaux de recherches portent sur Gustave Courbet, Eugène Boudin, la naissance de l’Impressionnisme et Edouard Manet, celui-ci tenant une place importante au sein de l’exposition avec sa scandaleuse Olympia. Elle a également été co-commissaire de l’exposition Cet obscur objet de désir. Autour de L’Origine du monde au Musée Courbet d’Ornans en 2014[2].

Notons cet engouement pour la question de la sexualité et de l’érotisme présente ces derniers temps dans les expositions. De Degas et le nu (2012), Masculin / Masculin (2013-2014), en passant par Sade. Attaquer le soleil(2014-2015) et Le Kâma-Sûtra. Spiritualité et érotisme dans l’art indien(Pinacothèque de Paris, 2014-2015) ou encore Fragonard amoureux. Galant et libertin(Musée du Luxembourg, 2015-2016), les musées souhaitent attirer un large public et éclaircir des pratiques et représentations sexuelles taboues ou méconnues. Or ici la femme est clairement les deux : un être étrange à la sexualité absente (dans le domaine conjugal hormis pour la descendance) ou bien terrifiante et attirante (dans le domaine de la prostitution). Splendeurs et misèress’inscrit par ailleurs dans le débat autour de la pénalisation ou de la dépénalisation de la prostitution[3], jalonnant l’histoire de la France et toujours aussi vif actuellement[4]. Cette exposition rend compte pour finir de la condition de la femme au travers de la prostitution dans la société et de l’emprise masculine au travers des relations prostituées/artistes.   

 

Le Musée d’Orsay, à l’histoire tourmentée et cœur de l’art de la seconde moitié du XIXe siècle au début du XXe[5], propose un véritable parcours instructif culturel en organisant quarante événements sur son exposition phare de la fin d’année 2015, comprenant des cabarets et des lectures, des concerts, des opéras filmés, du cinéma. La prostitution de 1850 à 1910 n’a jamais été autant explorée éclectiquement. Comme le démontre d’ailleurs les quelques quatre cents dix œuvres en tout genre (sculptures, peintures, moulages, courts-métrages, photographies, mobiliers…) mises en relation savamment par le scénographe Robert Carsen par leurs contrastes ou leurs similarités au sein des quinze salles d’exposition[6]. Un public majeur se voit offrir de ce fait la possibilité de s’immerger totalement dans le domaine artistique et prostitutionnel de cette fin du XIXe et ce début du XXe siècle et de prolonger sa réflexion intellectuelle et empathique grâce aux nombreux panneaux explicatifs et aux ouvrages publiés pour l’occasion. 

 

 

En quoi les différentes prostitutions sont-elles des vecteurs de renouveaux artistiques entre 1850 et 1910 ? Par quels moyens s’emparent-elles des nouvelles formes d’expression, à savoir la photographie et le cinéma, pour en faire des médias à vocation purement érotiques explorant l’intimité des amateurs (professionnels ou non) et des prostituées ? Dans quelles mesures cette exposition suscite-t-elle un questionnement sur le rôle et la place de la femme dans la société jusqu’à aujourd’hui ?

 

 

L’exposition Splendeurs et misères. Images de la prostitutionest incontestablement une exposition chrono-thématique qui laisse un large espace à l’expression de la photographie et du cinéma tout au long du XIXe – XXe siècles et procure chez le visiteur une réflexion le mettant en condition pour aborder deux pans de la prostitution : celle d’une époque révolue et celle qui lui est contemporaine. 

 

[1]Bougault V., « Splendeur des artistes, misères de la prostitution », Connaissances des arts – Splendeurs et misères images de la prostitution 1850-1910, H.S. n°685, p. 12 à 23

[2]Musée d’Orsay, « Splendeurs et misères », Electre [en ligne], consulté le 5 décembre 2015. URL : http://www.splendeurs-et-miseres-musee-orsay.electre.com

[3]Guillaume Fl., « Entretien avec les co-comissaires de l’exposition »,Beaux-Arts – Splendeurs & misères images de la prostitution 1850-1910, op. cit., p. 4-5

[4]Proposition de loi concernant la pénalisation des clients et l’accompagnement des prostituées en débat depuis 2013.

[5]Mathieu C., Musée d’Orsay. L’esprit du lieu, Paris, Nouvelles éditions Scala, 2013

[6]Musée d’Orsay, « Robert Carsen et l’exposition ‘Splendeurs et misères’ », Youtube[en ligne], consulté le 29 novembre 2015. URL :

https://www.youtube.com/watch?v=rvKEXlfRmUA&index=3&list=PLwUa6C-N-kpbyNxmpJuOpFKcWCdP4LqxR

František Kupka, La môme à Gallien, 1909-1910, Prague, Národní Galerie

Œuvre étant l’affiche de l’exposition prolongée à Amsterdam. Elle appuie sur le caractère moderne du renouvellement des formes et des couleurs pour davantage traduire les réactions des artistes par rapport à leur société. 

I. Une exposition chrono-thématique

A. Un axe chronologique ou l'étude d'une société

Les soixante années balayées par l’exposition Splendeurs et misères ne sont pas un choix anodin : elles montrent notamment l’emprunt des artistes-peintres du thème de la prostitution, jusqu’alors seulement représenté et moqué au travers des illustrations de diverses revues. Le régime du Second Empire (1852-1870) en concomitance avec l’avènement de l’art moderne (Charles Baudelaire, Le Peintre de la vie moderne, 1863) permettent donc de renouveler le répertoire artistique. L’exploitation du sujet de la prostitution perdura jusqu’à la veille de la Grande Guerre, durant laquelle les préoccupations artistiques changeront de points de vue[1].

C’est également une exploration historique des modes de vie de la seconde partie du XIXe siècle et du début du XXe qui est proposée aux visiteurs. En effet, la Première Guerre mondiale n’a pas été attendue pour que les femmes de classes moyennes exercent un emploi afin de subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille. Généralement, elles sont vendeuses, blanchisseuses, ouvrières… mais la prostitution s’impose à elle comme revenu supplémentaire dans un Paris qui tend de plus en plus à devenir la « capitale des loisirs »[2]. Les lieux de spectacles se multiplient considérablement sous Napoléon III. Opéras, théâtres, bals, cabarets, cafés-concerts ainsi que les boulevards disposent d’une révolution technologique : l’éclairage public donnant lieu au prolongement nocturne des divertissements et des plaisirs car le racolage y est autorisé (contrairement à la journée). Les demi-mondaines sont plus que présentes avec l’essor d’une société bourgeoise qui souhaite explorer une sexualité au-delà des codes maritaux. Par ailleurs, cette fin du XIXe siècle est marquée par le statut ambigu des maisons closes en tout genre. Mises en place par le régime réglementariste du Premier Empire qui entend encadrer la prostitution, elles sont la cible des abolitionnistes. Avant un retour dans les années 1910 à la notion de femme-marchandise qui se déplace peu à peu des maisons à la rue, on peut noter une certaine pudibonderie exacerbée à la fin du XIXe siècle où les mentalités masculines dominantes font de la femme en général un danger à la sexualité dévorante. 

 

[1]Bougault V., « Le thème de la vie moderne », Connaissances des arts – Splendeurs et misères images de la prostitution 1850-1910, H.S. n°685, p. 4 à 11

[2]Titre de la deuxième salle de l’exposition (« Paris, capitale des loisirs »)

B. Un axe thématique au travers de la scénographie

Henri de Toulouse-Lautrec, Au salon, le divan, vers 1893, huile et peinture à l’essence sur carton, 80 x 60 cm, São Paulo, Museu de Arte de São Paulo Assis Chateanbriand

 

La prostituée assise en face du spectateur n’est pas dans une position racoleuse : son regard semble perdu au loin et le peintre transmet parfaitement l’idée de mélancolie. 

Une fois l’axe chronologique étudié, il paraît plus aisé de dresser un tableau des différentes formes de prostitution évoquées par Splendeurs et misères. Car le but de l’exposition est de traiter de l’ensemble des pratiques prostitutionnelles, aussi bien dans les hautes sphères de la société que dans les bas-fonds. Le scénographe de l’exposition, Robert Carsen, a saisi cette volonté de mettre en relief tous les niveaux de prostitution explorés en fonction des époques en attribuant dix-sept nuances de rouge – écho de la passion, du désir amoureux et charnel – pour l’ensemble des quinze salles. Il s’agit pour lui d’ « aider et de soutenir la vision du spectateur »[1]afin de lui procurer une « expérience »[2]tel un spectacle qui le replongerait dans les diverses atmosphères de débauche. Finalement, le visiteur s’assimilerait à un client, qui au lieu d’être le voyeur et le consommateur de tableaux féminins, se positionnerait en amateur d’art. C’est pourquoi les artistes sont exposés les uns à côté des autres par leurs similitudes ou bien par leurs particularités face au traitement de la prostitution[3]. Les maisons closes, certes objet fantasmé et principal référentiel de la prostitution, ne sont abordées qu’à partir de la cinquième salle, après un couloir transitif rappelant une rue photographiée du cloaque. 

Les commissaires d’exposition et le scénographe ont choisi d’accueillir le spectateur par les genres de prostitution les plus communs et accessibles (rencontres dans les rues à l’instar de Jean Béraud, L’AttenteetLa Proposition[4]de 1885 puis dans les cafés et les espaces de loisirs). Puis il est invité à découvrir l’attente des prostituées de maisons closes sur de fastueux sofas en écho avec Au Salon : le divand’Henri Toulouse-Lautrec. Parmi tous les artistes qui jouent avec les codes du bordel(Edgar Degas, Félicien Rops, Constantin Guys), Toulouse-Lautrec est celui qui « préfère retenir un geste, une attitude, un moment d’intimité ou de tendresse et traduire un état d’âme, parfois dans la plus pure tradition du portrait psychologique. Les scènes sont mélancoliques, sans complaisance et les figures [du peintre] démontrent que toute prostituée est un être humain… »[5]. Pendant ses mois d’immersion dans la maison de haute tolérance au 6 rue des Moulins, il dépeint des prostituées dans leur quotidien (toilette, intimité et homosexualité, parties de cartes…) sans souci de jugement ni de voyeurisme[6]. Cette approche sincère est toutefois bouleversée par les luttes réglementaristes / abolitionnistes dans une salle aux tentures sombres pour mettre en exergue les fléaux sanitaires entraînés par la prostitution (syphilis entre autres) et le traitement pénitencier à Saint Lazare des femmes dites de mauvaise vie. La section « Imaginaire de la prostitution. Fantasmes et allégories » plus loin dans l’exposition pourrait être sa continuité moralisatrice, avant d’ouvrir à chaque fois une partie s’attardant soit sur « L’aristocratie du vice » selon les termes d’Émile Zola avec une reconstitution de la chambre de la Païva avec tout son mobilier, soit sur « Prostitution et modernité » engendrant les formes artistiques du début du XXe siècle. 

Or l’après prostitution n’est pas appréhendé au cours de l’exposition ; peut-être que les représentations se font rares et qu’il est bien plus difficile d’en sortir que d’y rentrer (désinscription auprès de la police des mœurs, disparition subite pour débuter une nouvelle vie…)[7]. 

 

[1]Musée d’Orsay, « Robert Carsen et l’exposition ‘Splendeurs et misères’ », op. cit.

[2]Ibidem

[3]Ibidem 

[4]Ces deux œuvres réunies forment un diptyque proche d’une séquence cinématographique (Musée d’Orsay, « Présentation de l’exposition ‘Splendeurs et misères’ », Youtube [en ligne], consulté le 29 novembre 2015. URL : https://www.youtube.com/watch?v=XTAio8bJeEg&list=PLwUa6C-N-kpbyNxmpJuOpFKcWCdP4LqxR&index=2)

[5]Lemonier M., « Monsieur Henri, le client de la rue des Moulins », Marianne – Au temps des maisons closes 1850-1946, hors-série, septembre 2015, p. 60 à 65

[6]Ibidem

[7]Gonzalesz-QuijanoL., « La prostitution et après ? », Marianne – Au temps des maisons closes 1850-1946, op. cit., p. 22

C. La prostitution et les arts : la nouveauté à l'épreuve

La richesse de la période démontrée par Splendeurs et misères suppose la question de la modernité. En effet, au travers de soixante ans, ce sont cinq courants artistiques majeurs qui y sont explorés, à savoir l’Académisme, le Naturalisme, l’Impressionnisme, le Fauvisme et l’Expressionnisme[1]. Et le sujet de la prostitution, en plus des innovations en terme de composition, découle directement d’une « Peinture des mœurs du présent »[2](Balzac) et du parangon élaboré par Charles Baudelaire au Salon de 1846 (puis dans Le Peintre de la vie moderne) qui recherche « l’héroïsme de la vie moderne »[3]par « les spectacles de la vie élégante et des milliers d’existences flottantes qui circulent dans les souterrains d’une grande ville – criminels et filles entretenues »[4]. Les figures suggérées par la prostitution répondent complètement à l’injonction de renouveau par l’observation des mœurs et de la déchéance de l’âme humaine, opposée à l’hypocrisie commune. C’est d’ailleurs ce que surnomme le poète et critique d’art : « Le beau dans l’horrible »[5]. Cette nouvelle beauté ne se trouve donc plus dans les cadres d’une société policée mais dans « Le bordel [qui] est un véritable laboratoire pour les artistes du XIXe siècle »[6]par une profusion d’images sur les différents types de prostitutions. De la rue en passant par les terrasses des cafés à l’heure de l’absinthe, les coulisses des opéras et théâtres, les classiques maisons closes ou encore les détours par l’Orientalisant et les figures mythologiques ayant une visée moralisante, aucun art – qu’il s’agisse de la peinture, de la sculpture, de la littérature, de la photographie, du cinéma, des lithographies, du mobilier… – n’a été épargné par la nudité dévoilée des femmes de joie, le maquillage outrancier et les parures affriolantes, les postures languissantes et les regards soutenus (Manet, Olympia, 1863). Le tout interférant dans les palettes et les formes appliquées des artistes, surtout au travers des mouvements fauve et expressionniste, pour aboutir au Cubisme avec Les Demoiselles d’Avignon de Picasso. Bien que l’œuvre ne soit pas présente, trois études du moins témoignent de l’apogée moderne atteinte à la fin de l’exposition.

  

Si la prostitution est un vecteur de nouveauté, elle est aussi en cette seconde moitié du XIXe siècle le reflet de l’artiste. La marginalité étant alors prônée, ce dernier assimilerait son travail vendu au corps de la prostituée[7]. C’est pourquoi Baudelaire n’hésite pas à affirmer « Qu’est-ce que l’art ? Prostitution. »[8].

Enfin, la mode devient par excellence la voie d’expression de la haute prostitution. Grâce à la diffusion de leur image par la photographie, les demi-mondaines donnent le ton en matière de goût, ce qui confère le titre de « couturiers »[9]à ceux qui les représentent dans l’opulence des tissus tels Henri Gervex et Rolla, 1878. Alors qu’il était de rigueur au cours du XIXe siècle de ne pas porter de signes ostentatoires insinuant sa petite vertu, les Grandes Horizontales prennent à contre-pied cette contrainte par leur toilette soignée et la promotion de la nudité. Ce goût pour la provocation, la mode et le jeu de la représentation relève de l’atemporalité : si au Salon de 1847, Auguste Clésinger choque avec son moulage d’après nature de la très galante Apollonie Sabatier intitulé Femme piquée par un serpentcritiqué de « daguerréotype en sculpture »[10]par Delacroix, le cliché publicitaire de Steven Meisel sous la direction de Tom Ford pour Opiumd’Yves Saint Laurent n’en est pas en reste. La convulsion jouissive du mannequin Sophie Dhal a effectivement été censurée dans de nombreux pays[11].

 

 

[1]Collectif, Splendeurs & misères. Images de la prostitution 1850-1910, cat. exp., Paris, Musée d’Orsay, 2015, page 9

[2]Bougault V., « Splendeur des artistes, misères de la prostitution », Connaissances des arts – Splendeurs et misères images de la prostitution 1850-1910, op. cit. 

[3]Ibidem 

[4]Ibidem

[5]Ibidem

[6]Guillaume Fl., « Entretien avec les co-comissaires de l’exposition », Beaux-Arts – Splendeurs & misères images de la prostitution 1850-1910, op. cit. 

[7]Laurentin E., « Prostitutions au XIXe siècle 3/4 : Exposition Splendeurs et misères. Images de la prostitution, 1850-1910au Musée d’Orsay, France culture [en ligne], émission « La fabrique de l’Histoire », première diffusion le 14 octobre 2015, consulté le 28 février 2016 : http://www.franceculture.fr/emissions/la-fabrique-de-lhistoire/prostitutions-au-xixe-siecle-34-exposition-splendeurs-et-miseres

[8]Collectif, Splendeurs & misères. Images de la prostitution 1850-1910, op. cit., quatrième de couverture

[9]Collectif, Prostitutions. Des représentations aveuglantes, Paris, Flammarion, Musée d’Orsay, 2015, page 64

[10]Ibidem, page 58

[11]Ibidem, pages 57-58

Auguste Clésinger, Femme piquée par un serpent, 1847, marbre, taille avec mise aux points, H. 56,5 / L. 180 / P. 70 cm Paris, Musée d’Orsay

 

Les veinures du marbre font écho à celles du corps humain. Aussi, le primat du teint blanc est plus que jamais souligné grâce au matériau.

Publicité pour le parfum Opiumd’Yves Saint Laurent, 2000, photographie de Steven Meisel, sous la direction de Tom Ford, modèle Sophie Dhal

 

La couleur marmoréenne est ici reprise, tout comme le courant de la pornographie chic instigué par le photographe Helmut Newton à partir des années 1970. 

II. Photographie et cinéma : deux nouveaux médias au service de la prostitution

Aurélien Scholl dans Le Figaro du 30 janvier 1862 s’exclame « Chaque Parisien perd en moyenne un quart d’heure par jour pour contempler les photographies, ce qui fait 90 heures à la fin de l’année »[1]. Il souligne de cette manière la prépondérance des nouveaux moyens d’expression au sein d’une partie de la société française, si l’on en croit ces termes, éprise par des clichés à tendance érotico-pornographique. 

 

[1]Collectif, Splendeurs & misères. Images de la prostitution 1850-1910, op. cit., page 75 (cité par Jean Sagne, L’Atelier du photographe, 1840-1940, Paris, Presses de la Renaissance, 1984, p. 290)

A. Les premiers pas du cinéma et de la photographie : une évolution sous les auspices de la prostitution

Alors que la photographie naît en 1839 (date canonique), le cinéma, quant à lui, apparaît bien plus tard dans le XIXe siècle. C’est pourquoi l’exposition offre davantage un riche panel de clichés et quelques courts-métrages qui soulignent la mise en place d’un nouvel ordre pictural où la réalité semblerait non plus suggérée – comme c’est le cas en peinture par exemple – mais imposée aux yeux du spectateur telle qu’elle serait. 

Splendeurs et misères s’attache tout particulièrement à retracer la saisie des pratiques et des prostitutions par le moyen photographique[1]. Après des expérimentations qui tâtonnent encore avec l’objet représenté, l’apparition du daguerréotype dès le milieu du XIXe siècle permet une vision nette et précise du corps de la femme en l’occurrence. Cet appareil, toutefois spécifique aux classes très aisées dû à son coût, donne au sujet le grain et le teint de peau, la pilosité qui lui sont caractéristiques[2]. La réalité est alors captivante pour le public masculin qui trouve dans le stéréoscope l’apogée de ses sensations à la même époque. Cette technique explore dorénavant en relief les corps lascifs ou les actes sexuels par la réorganisation de l’image dans le cerveau humain à partir de deux clichés différents et plats. 

 

Or ces nouveaux procédés techniques sont la cible de virulentes critiques qui dénoncent la débauche morale qu’ils entraînent. La Gazette judiciaire parue le 2 octobre 1861 fait état que « de telles images forment un spectacle dangereux, peuvent produire une excitation sur les sens, et constituent un outrage aux bonnes mœurs. Il en est ainsi, notamment pour ces photographies où la couleur vient donner à la forme l’apparence de la vie ; et pour ces photographies dont le double exemplaire, considéré à travers deux verres grossissants parallèles, prennent du relief, figurent aux yeux la réalité même »[3]. La stéréoscopie ou encore les couleurs appliquées soigneusement par les modèles-prostituées elles-mêmes seraient tout autant de vecteurs de perversion.

L’anonymat est bien souvent de rigueur dans une société contrôlée. Néanmoins, des ateliers de photographes dont les noms ont traversé les siècles à l’image de Nadar, Pierson ou Disdéri virent le jour et étaient connus pour les thèmes licencieux abordés. Puisque que les photographes, en raison d’un matériel encore trop imposant et non transportable ne pouvaient se déplacer dans les premiers temps et qu’il était interdit de pénétrer dans l’univers clos des maisons, ils recréaient dans leurs ateliers des scènes par l’opulence des décors. Les ateliers deviennent alors des analogues aux maisons de joie par les jeux de lumière (dans un cas celle-ci doit être absente lors du développement et atténuée selon les poses ; dans un autre, nul ne doit voir ce qui se passe à l’intérieur et les volets demeurent clos)[4].

 

[1]Musée d’Orsay, « La photographie dans l’exposition ‘Splendeurs et misères’ », Youtube [en ligne], consulté le 29 novembre 2015. URL : https://www.youtube.com/watch?v=xNb_MHV-INc&index=4&list=PLwUa6C-N-kpbyNxmpJuOpFKcWCdP4LqxR

[2]Collectif, Splendeurs & misères. Images de la prostitution 1850-1910, op. cit., page 70

[3]Ibidem, pages 70-71

[4]Ibidem, page 75

B. De la prostitution à la pornographie : naissance d’un marché lucratif au milieu du XIXe siècle

Si dans un premier temps la réalité prônée par la photographie n’est qu’une pure mise en scène, petit à petit, avec l’amélioration technique des appareils, une migration de l’atelier aux lieux de prostitution – les maisons closes essentiellement – va s’opérer et il ne s’agira non plus d’une simple vision mimétique sinon d’un rapport concret et direct avec le réel. Les corps et les sexes sont entièrement dévoilés, rompant le fantasme et s’exportant par un marché illégal telles des marchandises sur papier. Le divorce avec la peinture entre autres, toujours synonyme d’idéalisation, d’interprétation et de critique serait alors consommé. 

La prostitution influence la photographie à tel point qu’elles sont indissociables quant aux modèles qui s’offrent à l’objectif. En effet, aucune femme de grande vertu n’acceptant de se dévêtir et d’être l’objet d’une excitation sexuelle par ses postures, la prostituée (exception faite la plupart du temps à celles des maisons de joie, à celles inscrites sur les registres des mœurs de la police et aux courtisanes disposant d’un statut plus élevé) est l’égérie même des amateurs de photographie et de plaisirs. En 1857 un article de La Gavinie dans La Lumière ironise d’ailleurs sur cette pratique en ces termes : « Il y aurait une étude curieuse à faire sur des créatures d’un genre oublié par Buffon, et qui tient le milieu entre la lorette et la femme. Je veux parler des modèles, classe nombreuse, malpropre et fainéante. »[1]Mais le parallèle entre prostitution et photographie n’est plus que jamais présent si l’on reprend le triangle élaboré[2]par Marie Robert faisant du photographe, le souteneur ; du modèle, la prostituée et du destinataire qui choisit et achète des clichés grâce à un médium populaire l’égal du client qui feuillète dans les maisons de haute tolérance des albums pour sélectionner des filles. L’accès à la reproduction d’épreuves érotico-pornographiques – bien qu’interdites, susceptibles de peines et généralement détruites – génère des collections particulières et un système d’échange au sein d’une société très souvent masculine avide de délectation visuelle. Naît ainsi ce qu’André Adolphe Eugène Disdéri nomme « industrie malsaine »[3]dans son Art de la photographie.

La question de la diffusion de l’image est également accaparée par les Grandes Horizontales. Il n’y a moins une volonté ici de tendre vers des poses érotico-pornographiques que de promouvoir grâce à des cartes de visite dotées de petits portraits leurs charmes. Elles font appel aux plus grands photographes et n’hésitent pas à détourner l’éthique en soutenant une posture et un regard concupiscents, tout en suggestion[4]. 

L’exposition n’évoque toutefois pas directement des éléments contemporains liés à l’émergence du cinéma érotico-pornographique. Le premier film de cette catégorie sorti en 1897 intitulé Le Tub (cuvette pour la toilette) précède d’une dizaine d’année la naissance d’une industrie (fondation Saturne) dédiée à la production de film du registre exportables. Enfin le thème du voyeurisme surgit dès qu’il s’agit de cinéma car on ne peut pas passer sous silence l’idée que le spectateur pénètre l’intimité des lieux de prostitution en suivant sans être vu les femmes de joie. L’invention de la caméra portative en 1910 appuie le réalisme[5]. 

 

[1]Collectif, Splendeurs & misères. Images de la prostitution 1850-1910, op. cit.., page 71 (n°46, 14 novembre 1857, p. 183)

[2]Ibidem, page 71

[3]Ibidem, page 70 (introd. de Lafon de Camarsac, Paris, chez l’auteur, 1862, citation complète : « Parlerons-nous aussi de ces tristes nudités qui étalent avec une exaspérante vérité toutes les laideurs physiques et morales des modèles payés à la séance, de cette industrie malsaine qui relève plutôt des tribunaux correctionnels que de la critique d’art ? »)

[4]Bougault V., « Le thème de la vie moderne », Connaissances des arts – Splendeurs et misères images de la prostitution 1850-1910, op. cit.

[5]De la Tour D., « Maisons closes, chambres obscures et ciné cochon », Marianne – Au temps des maisons closes 1850-1946, hors-série, septembre 2015, p. 26-27

C. Une exploration scénographique des mœurs

Anonyme, [Femme assise bras croisés], entre 1900 et 1910, aristotype,17.4 x 12.4 cm, Paris, Musée d’Orsay

Splendeurs et misèrespropose une exploration des expérimentations artistiques de la seconde partie du XIXe siècle et de l’aube du XXe aux visiteurs. 

 

Certes la photographie et le cinéma érotico-pornographiques détiennent une place importante – ne négligeons pas les deux salles feutrées, écho de cabinets privés, interdites aux mineurs dont l’une projette un film licencieux d’époque et expose des épreuves condamnables pour outrage aux bonnes mœurs par leur réalité crue – mais d’autres thèmes de la prostitution évoqués par ces deux médias possèdent une place importante. Tout d’abord, plusieurs séries dites « scientifiques » à des fins judiciaires prises par André Brichot témoignent de l’encadrement de la prostitution. La première abordée dans la section « Maisons closes. De l’attente à la séduction : le langage des corps » a été commandée par la police afin de recenser les pratiques des maisons. C’est pourquoi sa « démarche [est] plutôt [qualifiée de] documentaire »[1]puisqu’il « rédige en parallèle un mémoire »[2]sur les mœurs auxquelles il est confronté. Mais le domaine médical devient lui-aussi avare de représentations photographiques pour les syphilitiques, les lieux de détention et d’avortements illégaux[3]. Pour éradiquer les comportements de débauche, la section « Prostitution dans l’ordre moral et social » met en exergue des clichés et des cires de visage et main atteintes par la syphilis afin de susciter le dégoût chez les novices ou amateurs avérés de prostitution. La photographie se fait en quelque sorte critique, contrebalançant avec les romans photos sillonnant les salles luxueuses et tapissées par des motifs damassés d’ « Aristocratie du vice ». L’un d’entre eux narre le rêve d’une jeune fille de joie souhaitant accéder au haut statut de courtisanes. La thématique du Rêve et de la réalité est perceptible dans le court-métrage de Ferdinand Zecca (un des pionniers du cinéma se voyant confier la direction artistique de Pathé) où l’on voit un homme badiner avec une prétendue prostituée avant de se réveiller non pas aux côtés d’elle mais à ceux d’un homme travesti. L’humour étant un pendant de la polissonnerie. Enfin, la dernière section interdite au moins de dix-huit ans, bien que singulière par ses clichés graveleux, s’attarde davantage sur le caractère presque familial des poses. La plupart des prises sont floutées et le cadrage mauvais, à l’instar des photographies de famille. Et il s’agit ici plus de l’exploration personnelle de la sexualité par les artistes (tels Pierre Louÿs) et amateurs qui souhaitent perpétuer les plaisirs une fois fixés sur du papier[4].

De cette manière, le photographe généralement non professionnel dans ce cas s’inscrit dans ce que Roland Barthes nomme le « ça a été »[5]considérant qu’une fois l’acte sexuel accompli, le cliché permet de se remémorer les émotions et de les récréer en quelque sorte. Son contemporain André Bazin, auteur de Qu’est-ce que le cinéma ?, appuie cette idée de pérennité de l’épreuve dans « Ontologie de l’image photographique »[6]. Pour finir, dans le cartel destiné à « Prostitution et modernité. Plaisirs d’amateurs », nous pouvons remarquer que l’ « impression optique reste la voix par laquelle l’excitation libidinale est le plus fréquemment éveillée »[7](Freud). Il paraît donc significatif que la représentation picturale, et au-delà, celle de l’instantané palpant la réalité soit la plus à même de servir les désirs du client-destinataire de la prostitution.  

 

[1]Laurentin E., op. cit. 

[2]Ibidem

[3]Lesauvage M., « La chair à vif : prostitution et photo au XIXe », Connaissances des arts – Splendeurs et misères images de la prostitution 1850-1910, H.S. n°685, p. 36 à 39

[4]Laurentin E., op. cit.

[5]Lesauvage M., « La chair à vif : prostitution et photo au XIXe », Connaissances des arts – Splendeurs et misères images de la prostitution 1850-1910, op. cit.

[6]Bazin A., Qu’est-ce que le cinéma ?, Paris, Les Éditions du Cerf, 2011 (page 14 : « la photographie ne crée pas, comme l’art, de l’éternité, elle embaume le temps, elle le soustrait seulement à sa propre corruption ») 

[7]Musée d’Orsay et Van Gogh Museum, Dossier de presse « Splendeurs et misères. Images de la prostitution 1850-1910 », Paris et Amsterdam, septembre 2015

III. Une "réflexion sociale" [1] rétrospective : quelles positions de la femme au fil du XIX-XXe siècles ?

 

[1]Guillaume Fl., « Entretien avec les co-commissaires de l’exposition », Beaux-Arts hors-série Splendeurs & misères images de la prostitution 1850-1910, op. cit., p. 5 

A. Les subterfuges de la prostitution : l’apprentissage des codes pour le spectateur contemporain

Le visiteur de Splendeurs et misères. Images de la prostitution peut s’interroger dans ses premiers pas sur le sujet même. En effet, la section « Ambiguïté » implique des codes et attitudes à décrypter afin de saisir le sens des œuvres, bien que plusieurs interprétations soient toujours possibles. 

Notre regard contemporain doit être mis en condition et subir une totale immersion lui permettant de comprendre qu’une femme promenant seule son petit chien (Ernest-Ange Duez, Splendeur, 1843, ci-contre) ou une autre assise patientant à un café (Édouard Manet, La Prune, 1878) sont tout autant de prétextes à une activité prostitutionnelle. Les femmes au XIXe-XXe siècles sont régies par des codes éthiques très stricts : il leur est interdit de fumer jusqu’en 1909, elles doivent toujours sortir accompagnées, elles n’ont pas le droit de boire de l’alcool (l’absinthe est d’ailleurs un fléau au sein des catégories sociales modestes) ni d’aller seule dans un café… Bref les filles de joie transgressent ces interdits et se font de cette manière remarquer par leur clientèle masculine. 

Leurs attitudes laissent aussi à penser à leur statut. Aucune honnête femme n’oserait dévoiler ses chevilles ou encore soutenir un regard aguicheur en souriant. Ces « indices très forts de moralité »[1]transparaissent dans La demoiselle de magasin (James Tissot, 1883-85). Les vendeuses, elles aussi touchées par la précarité, cèdent à la prostitution et l’on voit naître des « boutiques à surprises »[2]qui n’ont pas pour but de vendre un objet à un client si ce n’est le corps d’une femme. L’opéra et le théâtre sont encore d’autres endroits ambigus où il est suggéré une certaine forme de prostitution dans les coulisses. 

La question de l’intimité du spectateur face aux œuvres est d’autre part posée. L’effet ressenti n’est pas le même en fonction d’un grand ou d’un petit format. Les grandes toiles déjà achèvent la fin de la hiérarchie des genres en dépeignant des scènes ordinaires au lieu d’histoire (si l’histoire est empruntée, c’est toujours avec la volonté d’inclure soit une image positive ou négative de la prostitution : Théodore Chassériau, Nymphe endormie près d’une source, 1850 ; Thomas Couture, Le Char de la Courtisane, 1873) et supposent une contemplation commune où l’on se trouve submergé voire dominé par l’œuvre. Tandis qu’un petit format – type photographie – induit déjà une certaine complicité avec le sujet et une délectation plus personnelle. Le visiteur est alors en quelque sorte le client des images proposées et d’une prostitution visuelle.     

 

[1]Laurentin E., op. cit.

[2]Laurentin E., op. cit.

Ernest-Ange Duez, Splendeur, 1843,

huile sur toile, 136 x 57.50 cm, Paris,

Musée Carnavalet-Histoire de Paris

B. La question de la place de la femme au travers du regard masculin

Plusieurs hommes de lettres du XIXe siècle se sont exprimés sur la condition déplorable du sexe féminin, asservi par le sexe masculin. Pour Gustave Flaubert, « Les prostituées sont des filles du peuple débauchées par des bourgeois riches »[1]apparaissant comme des victimes de la société où les ressources financières sont mal réparties, profitant à certains aux dépends des autres. Victor Hugo, quant à lui, va même jusqu’à comparer la prostitution à de l’esclavagisme moderne puisqu’ « On dit que l’esclavage a disparu de la civilisation européenne. C’est une erreur. Il existe toujours, mais il ne pèse plus que sur la femme, et il s’appelle prostitution »[2]. Enfin Guy de Maupassant pose dans La Maison Tellier un des aspects de la prostitution à savoir « la sauvagerie dans la civilisation »[3]qui n’est rien autre que les rites de passage du jeune homme à l’âge adulte. Notons toutefois que ces écrivains étaient amateurs de courtisanes et autres filles de joie… Valérie Bougault utilise le terme « lieu de sociabilité masculine »[4]avec justesse pour les maisons closes car les hommes s’y réunissent afin de tenir diverses conversations et jouir des plaisirs. Alain Corbin renforce cette idée quand il évoque l’apprentissage de la sexualité chez les jeunes hommes et la nécessité de satisfaire les pulsions[5]. S’installent alors un abîme lorsque ceux-ci connaissent la prostitution tandis que la jeune vierge qu’ils épouseront ne sera vouée qu’à la perpétuation de la descendance sans accès à la jouissance. Seules les prostituées auraient le droit de prendre plaisir lors d’un acte sexuel étant donné qu’elles posséderaient un immense appétit presque fatal démontré dans « Imaginaire de la prostitution » (Gustave Mossa, Elle, 1905). Cette misogynie est tout aussi palpable dans « Ambiguïté » où les objets de formes phalliques (parapluies, cannes…) appuient les tensions sexuelles. 

Or, en parallèle avec cette vision dégradante, des courants féministes et égalitaires s’organisent. Leo Taxil proclame que « Par la prostitution, reconnue comme vice légal, on dégrade indignement la femme et l’on méconnaît l’égalité qui doit régner entre elle et l’homme. Ce mépris de la femme est dangereux pour l’ordre moral et social tout entier »[6] (La prostitution contemporaine : étude d’une question sociale, 1884). L’abolitionnisme devient la voie privilégiée des défenseurs des droits des femmes et d’une réelle égalité. Joséphine Butler s’exprime dans ce contexte : de classe aisée britannique, son mari la soutient dans ses actions revendiquant la protection des femmes et des enfants, ceux-ci trop souvent victimes de réseaux prostitutionnels pédophiles. Elle réussit de ce fait à repousser la majorité sexuelle de treize à seize ans et à promouvoir l’éducation. Non pas contre la prostitution, fruit d’un mal-être économique, mais contre l’appropriation du corps des femmes par l’État et par leurs époux, son investissement aboutit en 1884 à ce que soient reconnues les femmes propriétaires de leur corps, s’inscrivant dans d’autres mesures visant à une indépendance relative[7].

 

[1]De la Tour D., « Recrutement : « des filles du peuple débauchées par des bourgeois… », Marianne – Au temps des maisons closes 1850-1946, hors-série, septembre 2015, p. 18

[2]Ressouni-Demigneux K., « La prostituée, égérie du nu moderne », Beaux-Arts – Splendeurs & misères images de la prostitution 1850-1910, hors-série, 23/09/2015, p. 42 à 47

[3]Bougault V., « Splendeur des artistes, misères de la prostitution », Connaissances des arts – Splendeurs et misères images de la prostitution 1850-1910, op. cit., p. 12 à 23

[4]Ibidem

[5]Musée d’Orsay, « Le regard de l’historien : Alain Corbin », Youtube [en ligne], consulté le 29 février 2016. URL : https://www.youtube.com/watch?v=N1RetMLjTq8

[6]Musée d’Orsay et Van Gogh Museum, Dossier de presse, op. cit. 

[7]Collectif, Prostitutions. Des représentations aveuglantes, op. cit., page 52

C. Un sujet d’actualité suscitant toujours de vifs débats

Si les bornes chronologiques de l’exposition concentrent notre attention de 1850 à 1910, il ne faut cependant pas oublier que la prostitution dit populairement « le plus vieux métier du monde » détenait déjà ses propres critères bien avant le XIXe siècle et fut sujette à de grands bouleversements au cours du XXe. 

 

Au lendemain du second conflit mondial, Marthe Richard, conseillère municipale de Paris, fait passer une loi mettant fin à la prostitution réglementée : les maisons closes victimes depuis le début du siècle de la prostitution dans les rues ferment définitivement leurs portes. Cette législation s’inscrit dans une redéfinition du statut de la femme qui se voit accorder le droit de vote et d’éligibilité en avril 1944. Mais il faudra attendre encore quelques années avant que les maisons de joie des colonies françaises soient contraintes au même régime[1]. « La révolte des prostituées de Saint-Nizier » et « Le capotier » (deux émissions de France Culture de 2015) traitent pour l’une de la première grève « des travailleuses du sexe »[2]manifestant pour leurs droits et pour leur protection, soutenues par un prêtre les accueillant dans son église. Pour l’autre, un homme nous fait état des conditions des filles de joie auxquels il distribue des préservatifs « comme d’autres livrent des pizzas »[3]. Dans les deux cas, la parole est largement donnée aux prostituées qui témoignent de leur quotidien – à la fois professionnel et privé –, de leurs choix (métier exercé pour survivre) afin de montrer plus que jamais qu’il s’agit d’un problème d’actualité. La France est également balayée par des débats retentissant autour de la pénalisation/dépénalisation alimentés par les contestations féministes, les procès pour proxénétisme (comme l’affaire Dominique Strauss-Kahn) ou encore l’utilisation des médias pour devenir célèbre à l’instar de Zahia Dehar qui n’hésite pas à poser nue pour une campagne de sensibilisation végétarienne Peta renvoyant à l’idée de consommation de chair[4].  

Le renouvellement de la figure de la prostituée passe en outre par l’apport dans le cinéma français de réalisatrices qui « refuse [d’] esthétiser le corps et le « travail » des prostituées »[5]. Tandis que Splendeurs et misères voit éclore le cinéma, ce dernier va être marqué au fur et à mesure des années par la vision hégémonique des hommes sur le corps fantasmé de la femme. Mais à partir des années 1970, les mouvements féministes vont s’emparer de ce médium à des fins politiques et critiques. Il ne s’agit plus de réduire la prostituée à un être faible satisfaisant la domination masculine mais d’en faire une héroïne moderne et forte s’imposant face aux hommes et vecteur d’un courant de pensée qui souhaite établir l’indépendance de la femme. En réaction à Belle de jour de Luis Buñuel (1960), La Fiancée du pirate de Nelly Kaplan, (1969) et Jeanne Dielman de Chantal Akerman (1976) deviennent les leitmotivs de la défense des prostituées et des femmes en général. C’est pourquoi 

« L’irruption des femmes cinéastes, depuis le film-manifeste de Nelly Kaplan en 1969, a en partie changé la donne : la figure de la prostituée n’est plus seulement le véhicule de fantasmes, mais aussi l’instrument d’une critique sociale ou politique, ou d’une exploration psychologique. Dans tous ces films de femmes, la prostituée, qu’elle soit occasionnelle ou professionnelle, est le sujet conscient d’une situation et d’une histoire marquées par la contrainte. »[6].

 

Néanmoins, depuis quelques années, nous pouvons voir un retour à l’idéalisation – masculine ? – des maisons closes pour la série éponyme de Canal + créée par Mabrouk El Mechri, ou encore le traitement de la prostitution passagère chez une adolescente dans Jeune & Jolie de François Ozon (2013). 

 

[1]Konopnicki G., « Éditorial », Marianne – Au temps des maisons closes 1850-1946, op. cit., p. 3

[2]Aroney E. et Beressi J., « La révolte des prostituées de Saint-Nizier », France Culture, émission « Sur les docks », diffusion le 1erjuin 2015. URL : http://www.franceculture.fr/emission-sur-les-docks-la-revolte-des-prostituees-de-saint-nizier-2015-06-01

[3]Brouard A., « Le capotier », France Culture, émission « Les pieds sur terre », première diffusion le 23 novembre 2010. URL : http://www.franceculture.fr/emission-les-pieds-sur-terre-le-capotier-r-2015-06-02

[4]Kraft J., « L’image fantasmée de la catin, entre romantisme et diabolisation », Beaux-Arts – Splendeurs & misères images de la prostitution 1850-1910, op. cit., p. 63 à 65

[5]Collectif, Prostitutions. Des représentations aveuglantes, op. cit., page 223

[6]Ibidem, page 225

CONCLUSION

Splendeurs et misères. Images de la prostitution 1850-1910 dépasse de loin les 400 000 visiteurs et témoigne de ce fait de son immense succès auprès d’un public français et étranger. La continuité de l’exposition dans l’accrochage permanent avec « Théophile Steinlein chez les prostituées de la prison de Saint-Lazare » s’inscrit dans cette idée. 

 

Parler de « prostitutions » au pluriel paraît alors plus adéquat afin de souligner les différents pans des pratiques prostitutionnelles traités au travers d’un axe chrono-thématique. Des « pierreuses » et des « lorettes » en passant par les « filles en carte », « les verseuses », les pensionnaires des maisons closes et enfin les demi-mondaines, ce sont tout autant de thèmes abordés par la peinture brisant les codes des illustrations de presse, seul genre qui traitait jusqu’alors de la prostitution de manière plutôt satirique. Cette appropriation des bas-fonds voulus par Charles Baudelaire entre autres instaure un renouvellement artistique profond, en concomitance avec l’émergence de la photographie et du cinéma qui donnent à voir une réalité plus crue (bien que parfois reconstituée au début). L’exploration des mœurs est alors complète : les reproductions peu coûteuses de clichés permettent la diffusion des portraits de courtisanes tandis que des amateurs et des artistes jouent sur les codes de l’intimité. Photographie dans un premier temps puis cinéma deviennent ainsi indissociables des représentations érotico-pornographiques. Enfin l’exposition fait écho à notre actualité en travaillant plus ou moins explicitement sur le statut de la femme (du moins la publication Prostitution. Des représentations aveuglantes[1]s’attarde davantage sur le sujet) dans une société fortement masculinisée jusque dans la réalisation de longs-métrages au XXe et XXIe siècles. 

 

Exposition itinérante, on peut constater l’intérêt des populations à comprendre les mœurs d’une époque sans éviter les jugements de valeur (Easy Virtue : Prostitution in French Art, 1850-1910de février à juin 2016 au Van Gogh Museum). Le mot « misères » du titre français pour l’étude d’un phénomène quasiment centralisé sur la capitale pourrait par ailleurs renvoyer à l’exposition « Les bas-fonds du Baroque. La Rome du vice et de la misère » au Petit Palais en 2015. Notre héritage moral se fonderait donc sur une sorte de catharsis par un apport culturel et intellectuel riche et diversifié – passant dans le cadre de Splendeurs et misères par un film des Images de la prostitution immergeant totalement le spectateur.  

 

Enfin l’ouvrage Prostitution. Des représentations aveuglantes [2] peut être compris comme une prolongation de l’exposition ne pouvant pas tout aborder, ou sinon de façon très brève. En effet, il propose des lectures sur la prostitution coloniale, la prostitution des hommes ou encore sur l’homosexualité à la fois masculine et féminine[3]affichée notamment dans les maisons de haute tolérance. La globalité de l’exposition grâce à ses nombreuses publications et à l’organisation de conférences, colloques, projections filmiques, spectacles… offre un regard plus qu’enrichissant et novateur sur un sujet souvent jugé tabou. 

 

[1]Collectif, Prostitutions. Des représentations aveuglantes, op. cit., chapitres page 23 « À qui appartient le corps des femmes ? » et page 217 « Figures de prostituées au cinéma »

[2]Ibidem, chapitres page 35 « « Petites épouses », « ménagères », et prostituées en Afrique, Asie et Océanie », page 81 « Des femmes clientes ? », page 125 « La prostitution masculine au XIXe siècle »

[3]Musée d’Orsay, « Les Grandes Horizontales, portraits de courtisanes au XIXe siècle », Youtube [en ligne], consulté le 29 février 2016. URL : https://www.youtube.com/watch?v=S85IDp3YgiI (courtisane Liane de Pougy célèbre pour ses relations lesbiennes)

ANNEXE filmique : Bertrand Bonello, L’Apollonide : souvenir de la maison close, 2011

Dans le cadre du prolongement de l’exposition Splendeurs et misères. Images de la prostitution 1850-1910, le Musée d’Orsay a proposé entre autres des projections cinématographiques sous l’intitulé « La Rue sans joie. La prostitution au cinéma ». Le film de Bertrand Bonello y a fait l’ouverture en présence de son réalisateur. Le choix de ce film n’est pas anodin : il se déroule exactement sur le même fil chronologique que l’exposition et pourrait retracer les thèmes abordés dans la section « Maisons closes » par une représentation quasi totale du quotidien. Le générique pose d’ailleurs un panorama de toutes les activités assimilées à la vie dans la maison. 

En effet, on note à plusieurs reprises que l’hygiène et la toilette sont importantes, à tel point que des amendes peuvent être infligées si le client se plaint de mauvaises odeurs. L’entretien des corps passe également par la visite médicale, parfois redoutée, afin de détecter la syphilis, mal ravageur qui consumera petit à petit une des protagonistes dont le visage finira par ressembler à une cire d’étude scientifique présente dans la salle « La prostitution dans l’ordre moral et social ». D’ailleurs, la question de l’enregistrement policier est évoquée à l’arrivée d’une nouvelle fille de joie ; la maison close se doit d’être en règle avec la police des mœurs. 

La plupart des prostituées présentes dans L’Apollonide proviennent d’un milieu social modeste comme l’attestent les métiers à faibles revenus auparavant occupés (blanchisseuses, couturières…) rappelant la section « Ambiguïté ». Elles correspondent également au cliché de femmes superstitieuses tirant les cartes pour connaître leur avenir comme le faisait déjà remarquer Toulouse-Lautrec dans sa Partie de cartes (1893). La tenancière – ressemblant à la Mère Grégoire de Gustave Courbet (1855 et 1857-1859) et à la bienveillance peut-être un peu exagérée – veille au paiement (jetons à l’effigie de la maison), aux bonnes conduites et au luxe, malgré la prolifération de la prostitution de rue qui fait concurrence et entraînera la fermeture du lieu. La qualité de rendre plus réelle les scènes grâce au procédé cinématographique n’empêche pas moins que certains plans se rapprochent plus de tableaux par la profusion des couleurs – le huit-clos sombre de la maison de haute tolérance est détourné par l’arrivée de l’électricité et de ses fastueux luminaires – du décor (damassés, canapés, peintures…) et des costumes, profondément riches. Mais il y a également une préfiguration aux courants du XXe siècle et plus particulièrement du Fauvisme et du Cubisme quand celle surnommée « La femme qui rit » à cause de sa balafre est maquillée à outrance pour une prestation particulière et que seuls ses lèvres pourpres, ses yeux fardés de noir et son teint marmoréen jaillissent (photographie ci-dessous). Les masques pour l’ultime bal remémorent quant à eux les traits du visage les plus essentiels repris par Picasso par exemple. 

Le thème du voyeurisme n’est pas en reste. De nombreuses scènes font état de miroirs ou encore de vitres sans teint pour observer les couples, choisir les filles, surveiller… Aucune intimité n’est alors permise. Et le spectateur est identifié par la caméra au client – comme le visiteur dans l’exposition. 

Enfin, la profonde cruauté du statut de prostituée s’illustre par le traitement de certains hommes à leur encontre (comme celui ayant entaillé les joues de Madeleine dit ensuite « La femme qui rit »). Mais également par le rejet de la société caractérisé par des pseudos Études anthropométriques sur les prostituées et les voleuses, ouvrage de Pauline Tarnowsky (1892) influencé par la tendance physiognomoniste :

« La prostituée est à la femme ce que le criminel est à l’homme. On peut constater un amoindrissement des principaux diamètres de l’encéphale de plusieurs millimètres qui s’explique par le fait que les prostituées ont une tête à diamètre plus faible. En découle un amoindrissement de son contenu et une différence notable dans la quantité du cerveau. Comment s’étonner alors de l’affaiblissement de leur intelligence et de leur anormalité psychique. L’esprit obtus des unes est remplacé chez d’autres par un abrutissement plus prononcé et atteint chez quelques unes d’entre elles un état voisin de l’idiotie. »[1]

 

[1]Bonello B., L’Apollonide : souvenir de la maison close, France, 2011 (extrait : 1h32)

Extrait : 1h39

SOURCES

ARTICLES

 

BOUGAULT V., « Le thème de la vie moderne », Connaissances des arts – Splendeurs et misères images de la prostitution 1850-1910, H.S. n°685, p. 4 à 11

 

BOUGAULT V., « Splendeur des artistes, misères de la prostitution », Connaissances des arts – Splendeurs et misères images de la prostitution 1850-1910, H.S. n°685, p. 12 à 23

 

DE LA TOUR D., « Recrutement : « des filles du peuple débauchées par des bourgeois… », Marianne – Au temps des maisons closes 1850-1946, hors-série, septembre 2015, p. 18

 

DE LA TOUR D., « Maisons closes, chambres obscures et ciné cochon », Marianne – Au temps des maisons closes 1850-1946, hors-série, septembre 2015, p. 26-27

 

GONZALESZ-QUIJANO L., « La prostitution et après ? », Marianne – Au temps des maisons closes 1850-1946, hors-série, septembre 2015, p. 22

 

GUILLAUME Fl., « Entretien avec les co-comissaires de l’exposition », Beaux-Arts – Splendeurs & misères images de la prostitution 1850-1910, hors-série, 23/09/2015, p. 4-5

 

KONOPNICKI G., « Éditorial », Marianne – Au temps des maisons closes 1850-1946, hors-série, septembre 2015, p. 3

 

KRAFT J., « L’image fantasmée de la catin, entre romantisme et diabolisation », Beaux-Arts – Splendeurs & misères images de la prostitution 1850-1910, hors-série, 23/09/2015, p. 63 à 65

 

LEMONIER M., « Monsieur Henri, le client de la rue des Moulins », Marianne – Au temps des maisons closes 1850-1946, hors-série, septembre 2015, p. 60 à 65

 

LESAUVAGE M., « La chair à vif : prostitution et photo au XIXe », Connaissances des arts – Splendeurs et misères images de la prostitution 1850-1910, H.S. n°685, p. 36 à 39

 

RESSOUNI-DEMIGNEUX K., « La prostituée, égérie du nu moderne », Beaux-Arts – Splendeurs & misères images de la prostitution 1850-1910, hors-série, 23/09/2015, p. 42 à 47

 

 

CATALOGUE D’EXPOSITION et OUVRAGES COLLECTIFS

 

COLLECTIF, Prostitutions. Des représentations aveuglantes, Paris, Flammarion, Musée d’Orsay, 2015

 

COLLECTIF, Splendeurs & misères. Images de la prostitution 1850-1910, cat. exp., Paris, Musée d’Orsay, 2015

 

MUSÉE D’ORSAY et VAN GOGH MUSEUM, Dossier de presse « Splendeurs et misères. Images de la prostitution 1850-1910 », Paris et Amsterdam, septembre 2015

 

 

DOCUMENTAIRES VIDÉOS et AUDIOS

 

ARONEY E. et BERESSI J., « La révolte des prostituées de Saint-Nizier », France Culture, émission « Sur les docks », diffusion le 1erjuin 2015. URL :

http://www.franceculture.fr/emission-sur-les-docks-la-revolte-des-prostituees-de-saint-nizier-2015-06-01

 

BROUARD A., « Le capotier », France Culture, émission « Les pieds sur terre », première diffusion le 23 novembre 2010. URL :

http://www.franceculture.fr/emission-les-pieds-sur-terre-le-capotier-r-2015-06-02

 

LAURENTIN E., « Prostitutions au XIXe siècle 3/4 : Exposition Splendeurs et misères. Images de la prostitution, 1850-1910au Musée d’Orsay, France culture [en ligne], émission « La fabrique de l’Histoire », première diffusion le 14 octobre 2015, consulté le 28 février 2016 : http://www.franceculture.fr/emissions/la-fabrique-de-lhistoire/prostitutions-au-xixe-siecle-34-exposition-splendeurs-et-miseres

 

MUSÉE D’ORSAY, « La photographie dans l’exposition ‘Splendeurs et misères’ », Youtube [en ligne], consulté le 29 novembre 2015. URL :

https://www.youtube.com/watch?v=xNb_MHV-INc&index=4&list=PLwUa6C-N-kpbyNxmpJuOpFKcWCdP4LqxR

 

MUSÉE D’ORSAY, « Le regard de l’historien : Alain Corbin », Youtube [en ligne], consulté le 29 février 2016. URL : https://www.youtube.com/watch?v=N1RetMLjTq8

 

MUSÉE D’ORSAY, « Les Grandes Horizontales, portraits de courtisanes au XIXe siècle », Youtube [en ligne], consulté le 29 février 2016. URL : https://www.youtube.com/watch?v=S85IDp3YgiI

 

MUSÉE D’ORSAY, « Présentation de l’exposition ‘Splendeurs et misères’ », Youtube [en ligne], consulté le 29 novembre 2015. URL :

https://www.youtube.com/watch?v=XTAio8bJeEg&list=PLwUa6C-N-kpbyNxmpJuOpFKcWCdP4LqxR&index=2

 

MUSÉE D’ORSAY, « Robert Carsen et l’exposition ‘Splendeurs et misères’ », Youtube [en ligne], consulté le 29 novembre 2015. URL :

https://www.youtube.com/watch?v=rvKEXlfRmUA&index=3&list=PLwUa6C-N-kpbyNxmpJuOpFKcWCdP4LqxR

 

 

FILM

 

BONELLO B., L’Apollonide : souvenirs de la maison close, France, 2011

 

 

LIVRES

 

BAZIN A., Qu’est-ce que le cinéma ?, Paris, Les Éditions du Cerf, 2011

 

MATHIEU C., Musée d’Orsay. L’esprit du lieu, Paris, Nouvelles éditions Scala, 2013

 

 

SITE INTERNET

 

MUSÉE D’ORSAY, « Splendeurs et misères », Electre [en ligne], consulté le 5 décembre 2015. URL : http://www.splendeurs-et-miseres-musee-orsay.electre.com

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