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Certaines images sont susceptibles de heurter les sensibilités.

Le corps de l'artiste des années 1960 à nos jours

Mona Hatoum, The Negotiating Table (La Table des Négociations), 03 décembre 2011.

Festival d’Art contemporain du monde arabe. 

SOMMAIRE

INTRODUCTION

I. LE CORPS, CE NOUVEL INSTRUMENT ET CETTE « SCENE OU L’ON AGIT ».

A. À L’AUBE DE LA RUPTURE AVEC LA TRADITION : LE CORPS COMME NOUVEAU MEDIUM. 

B. CRITIQUES ET PARODIES DE LA RUPTURE INITIEE : ACHEVEMENT ET DEPASSEMENT.

C. UNE OUVERTURE DU MOI A L’AUTRE : PREMICES ET PREMIERES INTERACTIONS.

II. LE CORPS DOUBLE DU « MOI » AGISSANT SUR LA SCENE SOCIALE.

A. UN FACE-A-FACE AVEC LES POUVOIRS POLITIQUES IMPLIQUANT LE RITUEL. 

B. LE CORPS INTERROGEANT L’IDENTITE. 

C. LE CORPS : « PRODUIT DE MARKETING FETICHE ».

III. QUAND LES NOUVELLES TECHNOLOGIES ET LA SCIENCE SE GREFFENT AU CORPS.

A. UN NOUVEAU SUPPORT D’EXPERIMENTATIONS. 

B. LE CORPS HYBRIDE. 

C. LA DEPENDANCE TECHNOLOGIQUE POUR REPOUSSER LE PRISME DE LA MORT. 

CONCLUSION

SOURCES

INTRODUCTION

Michel Féher, philosophe français, a déclaré à propos du traitement du corps de et par l’artiste dans l’axe chronologique qui nous est donné à étudier qu’il résultait de la « tension constante entre les mécanismes du pouvoir et les techniques de résistance[1] ». En effet, le corps de l’artiste, si l’on considère les premières prestations dadas puis surréalistes, a été soumis à la pression des différentes facettes exercées par le pouvoir : politique d’une part, mais également sociale, économique, culturelle, identitaire… En réaction à l’enlisement de la Première Guerre mondiale, des figures – telles qu’Hugo Ball – fournissent une première réponse corporelle chargée d’une idéologie de la table-rase et nihiliste. Ce dernier se met alors en scène au Cabaret Voltaire à Zurich et pose les bases du mouvement Dada lors d’une prestation déguisée, le 08 février 1916, en présence de public durant laquelle il lit ses poèmes. Puis les Surréalistes vont à leur tour offrir leur corps à toutes sortes d’expérimentations, par exemple hypnotiques, ayant pour visée d’interroger l’inconscient. 

Or c’est précisément dans ces réflexions amorcées par ces deux mouvements d’avant-gardes que le corps de l’artiste va s’inscrire tout en les poursuivant dès les années 1960. L’amertume de l’exposition du corps à des maltraitances de tout type pendant la Seconde Guerre mondiale pousse les artistes à l’explorer sous la forme d’un outil, d’une machine tout en lui appliquant une visée contestataire. Les artistes de l’Actionnisme viennois vont d’ailleurs s’inscrire dans cette logique afin d’exacerber leurs réactions face à la guerre et le traumatisme imprégné dans les régimes anciennement sous tutelle nazie. L’objectif étant, dans tous les cas et au travers des décennies, de suggérer une nouvelle utopie et de résoudre les conflits. Conflits par rapport à ces « mécanismes du pouvoir » (cités ci-dessus) dont la traditionnelle vision de l’artiste génie et individuel. Conflits par rapport à la conception dogmatique de l’art séparant la forme du contenu, remise en cause par Susan Sontag[2]. Conflits par rapport à la société post-guerre en reconstruction glorifiant le culte du capitalisme et du consumérisme. Enfin, conflits nourris par un contexte tendu et coercitif des années 1970-1980 incarné par le couple Ronald Reagan (Etats-Unis) / Margaret Thatcher (Grande-Bretagne), la pauvreté, ou encore le Sida… Mais en réplique à ces conflits, les artistes imposent grâce à leur corps une résistance à la fois physique et mentale. Ils dictent une redéfinition de l’art visuel, une critique de la réification du corps, une extension de ce dernier comme production d’un « espace social[3] » selon le sociologue Henri Lefebvre se référant à la théorie de Merleau-Ponty qui insiste sur la volonté de « revenir au social avec lequel nous sommes en contact par le simple fait d’exister et que nous portons avec nous avant toute objectivisation[4] ». Car le social mis en avant par le corps de l’artiste est celui de la fusion entre lui, acteur, et le spectateur expliquant la diversité des revendications communes, des refoulements infligés, provenant d’un panel de cultures et de disciplines. 

 

Comment le corps de l’artiste se fait-il le reflet de la société pour interroger, critiquer et bouleverser la tradition, ainsi qu’influencer l’histoire à l’aide d’un corps comme scène symptomatique et radicale ?

 

Nous aborderons le corps peintre comme scène d’action avant de nous intéresser à celui-ci doublé du « moi » agissant cette fois-ci sur la scène sociale. Enfin, nous étudierons la manière dont les nouvelles technologies et la science se greffent au corps.

 

[1]JONES Amelia et WARR Tracey, Le corps de l’artiste, Paris, Phaidon, 2011, page 23.

[2]Ibidem, page 12.

[3]Ibidem, page 19 (dans LEFEBVRE Henri, La Production de l’espace, Paris, Anthropos, 2000).

[4]Ibidem, page 21 (dans MERLEAU-PONTY Maurice, La Phénoménologie de l’esprit, Paris, Gallimard, 1961).

I. LE CORPS, CE NOUVEL INSTRUMENT ET CETTE « SCENE OÙ L’ON AGIT » (in JONES Amelia et WARR Tracey, op. cit, page 50).

La redéfinition de l’art s’enracinant dans les années 1960 passe incontestablement par l’interrogation des instruments permettant de créer. Les artistes abolissent les multiples étapes rythmant la transition de l’idée à sa mise en forme. Il ne s’agit plus de passer de l’idée à l’outil (pinceaux, toiles, burins…) permettant l’aboutissement d’une œuvre mais de passer directement de l’idée à la fusion vie / art. Le corps peintre devient le nouveau référent.  

A. À l’aube de la rupture avec la tradition : le corps comme médium.

Jackson Pollock, One: Number 31,1950, 1950.

  • Première fusion élaborée par Jackson Pollock dans les années 1940-1950 à New-York : la ligne et la couleur.

  • Technique de l’action painting: renvoyer la peinture à son acte de création originel.

  • Établir une nouvelle relation entre le corps de l’artiste et l’élaboration de l’œuvre. 

  • Critique Thomas McEvilley, article « Art in the Dark », Artforum, 12, été 1986, pages 63-63 :

« expression directe de la personnalité de l’artiste »

« que la personne même de l’artiste était en réalité de l'art [1] »

  • Geste direct de l’artiste influençant la génération d’artistes à venir dans l’utilisation du corps et de la performance.

  • Photographies de Hans Namuth permettant de déployer les techniques de Pollock dans le monde. 

  • Limite : encore dépendance du corps à un outil (bâtonnets pour le dreeping et pot de peinture pour le pouring) et individualisme de l’artiste (« personnifi[cation de] l’hégémonie nouvelle de la culture américaine[2] »).

  • Donc volonté pour les artistes successeurs de briser définitivement les derniers vestiges de médiation de l’idée à sa réalisation corporelle. Apporter une relation avec le public.

  • Georges Mathieu, Hommage au général Hideyoshi, 1957, Osaka, Japon (à gauche) : performance devant le public : mise en scène des peintures gestuelles.

  • Saburo Murakami, Traverser plusieurs écrans de papier, 1956, Tokyo (à droite) : corps détruisant la traditionnelle toile.

 

[1]JONES Amelia et WARR Tracey, op. cit., page 23.

[2]Ibidem.

  • Dépassement de la peinture gestuelle par l’application totale et directe du corps (soit de l’artiste directement soit par le biais de « pinceaux vivants ») : 

« Et voilà que, comme par miracle, la brosse revenait, mais cette fois vivante. Sous ma direction, la chair elle-même appliquait la couleur sur la surface et avec une précision parfaite. J’étais en mesure de rester constamment à l’exacte distance « X » de ma toile et je pouvais ainsi dominer ma création de façon continue, tout au long de son exécution[1]. »

Yves Klein, Anthropométrie sans titre, 1960

  • Faire du corps le support de l’œuvre, à la fois par sa fonction d’outil mais aussi par son élévation au rang d’œuvre d’art suggérée par Pierre Manzoni (Sculptures vivantes en 1961).

  • Radicalité du corps de l’artiste comme implication décisive de l’acte de peindre : artistes du groupe Gutaï dont Kazuo Shiraga, Chizensei Konseimao, 1960.

 

[1]Ibidem, page 54 : Yves Klein, « Le vrai devient réalité », 1960.

B. Critiques et parodies de la rupture initiée : achèvements et dépassements.

  • Opposition à la vision hégémonique et machisme de l’acte de peindre : Shigeko Kubota, Vagina Painting, 1965 (ci-contre). 

  • D’une part : performance donc stimulation du public désormais pérenne.

  • D’autre part : réplique faite concernant les pratiques de Pollock (considérer ici que le vagin de la femme devient une expression artistique propre) et celles de Klein utilisant le corps de la femme.

 

  • Dans la même idée : Rachel Lachowicz, Du rouge, pas du bleu, 1992.

  • Inversement : corps masculins remplaçant ceux des femmes, parés de peinture rouge.

  • Parodie féministe. 

  • Travail sur le maquillage comme source de discréditation de la femme et de réification. 

  • D’autre part : utilisation du corps pour célébrer la vie tout en étant un marqueur de souffrances.

  • Parallèle établi entre les Anthropométries d’Yves Klein et les Traces corporelles d’Ana Mendieta en 1974 (celle-ci par les longues coulures pourpres rappelant sans conteste les menstruations, donc le cycle de la vie mais aussi un geste de désespoir).

  • Echo de Paul McCarthy, Peinture de visage – Sol ligne blanche, 1972 à Nam June Païk, Interprétation de la Composition 1960 No. 10 de La Monte Young pour Bob Morris (Zen for Head), 1962.

  • En effet : deux appropriations différentes de la tête comme « marqueur[1] » de la peinture gestuelle.

  • Païk, membre de Fluxus : réflexion mentale passant par l’utilisation immédiate de la tête comme médium (ainsi que ses mains).

  • McCarthy, performance : mise en exergue de la résistance physique, et aussi mentale lorsqu’il pousse avec sa tête un saut de peinture. 

  • Ainsi jouer la force du corps, à la fois physique et spirituelle. 

 

[1]JONES Amelia et WARR Tracey, op. cit., page 60.

C. Une ouverture du « moi » à l’autre : prémices et premières interactions.

  • Jean-Luc Nancy, philosophe français : « Nous ne connaissons, nous ne concevons, nous n’imaginons même que le corps signifiant […]. Le corps ne peut appartenir à la communauté qu’en étant lui-même signifiant[1]. »

  • Peinture gestuelle érigée par Pollock : remettre en avant le corps jusqu’ici oublié dans la tradition visuelle et technique. 

  • Aussi, successeurs rompant avec l’idéologie de Clément Greenberg (intérêt pour le résultat final) et d’Harold Rosenberg (intérêt pour le processus) en imposant leur corps comme médium premier dans lequel tout se passe.

 

[1]JONES Amelia et WARR Tracey, op. cit., page 18 (dans LINGIS Alphonso, « Bodies that Touch US », Thesis Eleven, 36, 1993, page 159).

Carolee Schneemann, Meat Joy (Joie de la viande), 1964, Paris.

  • Corps de l’artiste devenant corps de la société : performances passives (où le regardeur n’agit pas encore) se mutent en performances actives dans lesquelles son corps est appelé à intervenir, jusqu’à se déployer entièrement dans les happenings.

  • Happening de Schneemann lors de la première édition du Festival de la Libre Expression : corps de l’artiste et corps des participants se mélangeant à la peinture, aux débris de viande et abats…

  • Soumettre le corps à son état premier : la chair. Donc insinuer son état de faiblesse mais aussi son potentiel créatif, imprévu, malléable. 

  • Carolee Schneemann, More Than Meat Joy, 1979 :

« Les équivalences physiques étaient comme un flot psychique imaginé dans lequel les divers éléments s’entremêlaient et gagnaient en intensité grâce à l’énergie du public[1]. »

« Je suis créatrice d’images, mais j’explore aussi la capacité de la chair à être une image, qui est le matériau avec lequel j’ai choisi de travailler[2]. »

  • Ainsi : abolition de la frontière entre le regardeur et l’acteur, entre le public et l’artiste.

  • Objectif : fusion de l’art et de la vie.

 

[1]Ibidem, page 60.

[2]Ibidem, page 61.

  • Détournement : peinture subissant l’action violente du corps pour revendiquer non plus l’oppression de la tradition picturale mais celle de la société. 

  • Violence du geste : 

  • Shimamoto, Exécuter un tableau en jetant des pots de peintures, 1956, Ohara Kaikan, Tokyo : nuances de peintures rappelant l’anéantissement et la pulvérisation.

  • Niki de Saint-Phalle, Tir, 1961 (ci-contre) : tirs sur des toiles la perçant et laissant des traces de peintures.

  • Objectif : destruction des valeurs traditionnelles (héritage de la guerre pour l’un et de la société patriarcale pour l’autre) passant par la destruction, la blessure de leurs œuvres. 

 

  • Procédés visant à interroger physiquement et spirituellement le regardeur/acteur sur son conditionnement. 

II. LE CORPS DOUBLÉ DU "MOI" AGISSANT SUR LA SCÈNE SOCIALE.

Maurice Merleau-Ponty, « L’entrelacs et le chiasme », in Claude Lefort (dir.), Le Visible et l’invisible, Paris, Gallimard, 1964, page 139 (tiré de Le corps de l’artiste par Amelia Jones et Tracey Warr, page 27).

« La franchise par la chair […] la chair, non comme fait ou somme de faits, mais comme le lieu d’une inscription de vérité […] »

 

 

La chair, et par extension le corps de l’artiste, en plus de renverser les bases de la pratique picturale, induirait un rapport au réel et à la vérité. En effet, sa position de reflet nous donnerait l’exacte appréhension de la réalité tout en nous formulant, en creux de la démarche contestataire avancée, le véritable statut de l’humain en tant que sujet et non objet conditionné et passif. Le but étant de faire de cette chair, l’îlot des revendications construisant une société nouvelle et critiquant la répression. 

A. Un face-à-face avec les pouvoirs politiques impliquant le rituel.

  • Corps de l’artiste : étendard des revendications faites à l’encontre des différentes politiques brutales et oppressives menées dans le monde.

  • Contexte d’après guerre : effervescence de la reconstruction puis décadence et pauvreté.

  • Fil de l’histoire gangrené par les conflits de la Guerre froide opposant le bloc de l’Est au bloc de l’Ouest puis de ceux engendrés par l’effondrement et la dislocation de l’URSS. 

  • Avènement de nouvelles questions politiques à la fin du XXe siècle.

  • Ritualiser pour exorciser.

  • Années 1960 : réponse des artistes face à la barbarie et à l’illégitimité de la guerre au Vietnam. Représenter les violences des forces américaines perpétrées en passant par une violence appliquée au corps de l’artiste.

  • Yoko Ono, Cut Piece (Taillée en pièce), 1964, salle Yamaichi, Kyoto.

  • Nouvelles présentations de la performance en 1966 à l’Institute of Contemporary Art de Londres et en 2004 au théâtre Ranelagh à Paris : actualisation du propos.

  • Années 1970 : stratégie hégémonique capitaliste des Etats-Unis s’étendant dans le monde entier par l’expansion de leur culture et de leur politique. Tension supplémentaire avec le bloc communiste. 

  • Joseph Beuys, I Like America and America Likes me (J’aime l’Amérique et l’Amérique m’aime), 1974, René Bloch Gallery, New York (à gauche).

  • Performance chamanique et ritualisée. Volonté d’aboutir à la pacification des relations internationales. Faire interagir et dialoguer les différents symboles (coyote pour « l’Ouest sauvage » et dispersés ainsi que la galerie pour la société capitaliste)[1].

  • Echo : Oleg Kulik, I Bite America and America bites me (Je mords l’Amérique et l’Amérique me mord), 1997, Deitch Projects, New York (à droite). Critiquer la vision impérialiste des Etats-Unis sur la Russie réduisant les autres peuples au rang d’animal s’ils ne partagent pas la culture américaine.

 

[1]JONES Amelia et WARR Tracey, op. cit., page 76.

  • Années 1980 : enlisement des conflits voyant naître petit à petit la naissance d’une géopolitique basée sur la négociation. Donc volonté de mettre un terme aux guerres. Mais apparition des laissés-pour-compte(tiers-monde après les décolonisations). 

  • Mona Hatoum, The Negotiating Table (La Table des négociations), 1983, The Western Front, Vancouver (performance renouvelée en 2011). Image d'accueil de la page.

  • Artiste allongée sur une table dans un sac mortuaire (rappel des nombreuses victimes). Voix d’hommes évoquant des discussions politique. Susciter l’incapacité d’agir et de réagir des regardeurs. Emigrée forcée à cause de l’annexion du Liban par Israël. Questionner le statut de migrant et son rejet[1].

 

[1]Ibidem, page 150.

  • Années 1990 : guerres concernant les limites des territoires prenant de l’ampleur. Question de l’identité nationale.

  • Marina Abramović, Balkan Baroque (Baroque balkanique), 1997, XLVIe Biennale de Venise.

  • Montrer son intérêt propre envers la culture, le peuple et l’identité balkaniques. Interrogation de l’artiste sur les querelles intérieures et extérieures, c’est-à-dire entre son « moi » et son observation de l’agressivité des actions sur la scène internationale. 

B. Le corps interrogeant l’identité.

  • Précédemment : catharsis opérée via le corps de l’artiste à propos des conflits et du rôle passif du regardeur.

  • Ici : catharsis culturelle et identitaire. Corps de l’artiste se faisant support des interrogations sur le genre, les sexualités, la place des minorités et les stéréotypes véhiculés par les valeurs traditionnelles.

  • Révolution et libération sexuelle : opérer des changements radicaux dans la société pour permettre une rénovation des mœurs (Philippe Dagen : « l’incertitude, la plasticité et la mutabilité des mœurs et des corps[1] »).

  • Initier la rupture entre le privé et le public. Volonté de donner à voir l’essence même du corps.

 

  • A propos de Judith Butler, dans son Gender Body, 1990 : « She argued that gender (masculine/feminine) was all too often viewed as an extension of one’s sexual biology (male/female), as a ‘natural’ characteristic, but it was neither natural nor fixed, it was ‘unnatural’, a social construct that individuals acquire and which then dedicate desire (for the other gender)[2]. »

  • Donc les individus ne sont pas fixés dans un genre. 

  • Héritage dada sur le genre (Marcel Duchamp se doublant de Rrose Sélavy) ré-agencé et réinterprété dès les années 1960 : travestissements

  • De Pierre Molinier (L’Aiguillon de l’amour, 1966-68 se campant en hermaphrodite).

  • D’Andy Warhol (Self-Portrait in Drag ou Autoportrait en travesti, 1981) s’auto-qualifiant de « miroir[3] » montrant que l’artiste est le reflet de la condition de la société.

  • De Yasumasa Morimura répondant à M. Duchamp dans Doublenage (Marcel) en 1988 introduisant la question de l’identité culturelle.

  • Ainsi performance du genre : l’imiter, le décomposer par des postures et des objets… pour mieux comprendre sa structure.

  • Soulever la mutation de la société par celle des corps amorcée par la transsexualité, le transgendérisme :

  • Del LaGrace Volcano, The Artist as a Young Herm, Paris, 2004.Considéré comme « a multi-gendered hybrid[4] ». Femme devenue homme témoignant de la complicité du genre humain et de ses multiples facettes. Offrir son corps comme exemple de la permutabilité du genre et de la sexualité.

  • Remettre en cause le statut expressif de la femme face à l’hégémonie de la figure masculine dans l’art : cliché publicitaire de Lyndas Benglis, Untitled, 1974 auquel répond celui de Robert Morris la même année. Polémique de la posture avec un godemichet de Benglis tandis que Morris campé en sadomasochiste ne suscite pas de réactions. 

  • 28 juin 1969, New York : émeutes du Stonewall. Luttes pour la reconnaissance de l’homosexualité. Artistes se mettant par la suite en scène pour défendre leur identité et l’élever aux sujets de représentation nobles, dignes par des références à la sculpture antique (Robert Mapplethorpe, The Sluggard, 1988 et Ajitto, 1981). 

  • Mapplethorpe : mettre en avant la question du traitement des minorités raciales en parallèle de celle de la sexualité. Répercutions :

  • Lyle Ashton Harris et Renée Cox, Queen, Alias & Id : The Child(Reine, Alias et Id : l’enfant), 1994 : destruction de la famille nucléaire, place offerte dans la société à la nation africaine.

  • Laura Aguilar, In Sandy’s Room, Self-Portrait (Dans la chambre de Sandy, Autoportrait), 1991 : difficulté de trouver sa place en tant que femme d’Amérique latine et lesbienne. Poids du corps lorsqu’il ne correspond pas au modèle érigé par la société.

 

  • Interrogation et volonté de reconnaissance de la culture indigène : Coco Fusco et Guillermo Gómez-Peña, Deux Amérindiens inconnus en visite à Madrid, 1992, Plaza de Colón, Madrid. Confronter l’Espagne à son passé de conquistador et de dépouilleur. Souligner l’acculturation et la « réification » subies[5].

 

[1]DAGEN Philippe, L’art dans le monde de 1960 à nos jours, Paris, Éditions Hazan, 2012, page 176.

[2]MAHON Alyce, Eroticism and art, New-York, Oxford University Press, 2005, format E-book, in Chapitre 10 :  Erotic Fragmentation and Abjection – Gender trouble (« Elle argumenta que le genre (masculin/féminin) était bien trop vu comme une extension de nos biologies sexuelles (mâle/femelle), comme une caractéristique ‘naturelle’, mais que ce n’était ni naturel ni fixé, c’était ‘non-naturel’, une construction sociale que les individus acquièrent et avec laquelle ensuite ils dédient leur désir (pour l’autre genre) ».

[3]JONES Amelia et WARR Tracey, op. cit., page 153 : « Je suis sûr que je ne vais rien voir si je regarde dans un miroir. Les gens me qualifient toujours de miroir, et si un miroir regarde dans un miroir, qu’y a-t-il à voir ? ».

[4]LORD Catherine et MEYER Richard, Art & Queer Culture, New York, Phaidon Press Limited, 2013, page 42 (« un genre multiple et hybride »).

[5]JONES Amelia et WARR Tracey, op. cit., page 159.

C. Le corps : "produit de marketing fétiche" ? in JONES Amelia et WARR Tracey, op. cit

  • Années 1960 : émergence de la société de consommation poussée par le capitalisme se déployant en Europe de l’Ouest sous l’égide des Etats-Unis.

  • Corps élevé au rang d’objet par les nouveaux médias : publicités, télévision…

  • Opposition des artistes à cette idéologie parcourant les décennies et parodies.

  • Artistes marchandant leur corps pour remettre en cause les conditions et les institutions du marché de l’art. Paradoxalement, art corporel n’insinuant pas la capacité mercantile du support à la base.

  • Valie Export, Tapp und Tsukino (Tapp et cinéma du toucher), 1968, Vienne (à gauche).

  • Orlan, Le Baiser de l’artiste, 1977, Paris, Foire international d’art contemporain (à droite). Montrer qu’une décennie plus tard : aucun changement perceptible.

  • Prostitution du corps de l’artiste flagrante : Annie Sprinkle provenant de cet univers. 

  • Poser la question de la valeur artistique[1] dans ses performances telles The Bosom Ballet (Le Ballet de la poitrine), 1989-1992 (à gauche) ou encore Post-Porn Modernist Show (Spectacle Post-Pornmoderniste) en 1992 à New York (à droite).

 

[1]BAQUÉ Dominique, Mauvais Genre(s) : Érotisme, pornographie, art contemporain, Paris, Éditions du Regard, 2002, page 95.

  • D’autre part : détournement des codes de la publicité et de la réification du corps.

  • Utiliser la publicité pour servir le corps de l’artiste et concurrencer l’essor des nouveaux médias. 

  • Série de pages de publicités réalisées par Jeff Koons en 1989 pour Arts Magazine ,Artforum, Art in America et Flash Art.

  • Mises en scène précises s’emparant de la conventionnelle forme de la publicité (saturation des couleurs, corps parfaits, décors…)[1]. 

 

[1]JONES Amelia et WARR Tracey, op. cit., page 157.

III. QUAND LES NOUVELLES TECHNOLOGIES ET LA SCIENCE SE GREFFENT AU CORPS.

L’influence des sciences et du processus mécanique n’est pas nouveau au XXe siècle : Andy Warhol s’en est déjà servi pour ses sérigraphies (d’ailleurs il est fortement attaché à l’utilisation de l’image publicitaire), Roy Lichtenstein pour ses reproductions et décompositions d’images. Tous deux font une place importante aux nouvelles technologies dans leurs œuvres, sans pour autant les appliquer directement à leur corps. 

De ce fait, après avoir étudié comment le corps interrogeait les limites psychiques, nous allons nous tourner vers son application au champ technique et les limites physiques qui vont lui être inhérentes. 

A. Un nouveau support d'expérimentations.

  • Popularisation des nouveaux médias comme la télévision : permettre aux artistes nouvelles manières d’explorer leur corps et le corps de la société.

  • Bruce Nauman, Art Make Up, 1967-1968 (ci-dessus).

  • Utilisation du portapack de Sony.

  • S’approprier le genre du film pour transcrire ses expérimentations corporelles. Immortalisation de sa performance.

  • Inscription d’un nouveau rapport avec le regardeur : abolition de l’intimité. Souligner (toujours) la fusion privé / public.

  • Nouvelle manière d’interroger le conditionnement humain en offrant son corps à l’observation dans des gestes rythmés.

  • Nam June Païk et Charlotte Moorman, TV Bra for a Living Sculpture(Soutien-gorge télévisuel pour une sculpture vivante), 1969, « TV as a Creative Medium » (« La télévision comme outil de création »), Howard Wise Gallery, New York.

  • Goût de Païk pour l’exploitation du format de la télévision.

  • Incruster la technique pour fusionner l’art et la vie.

  • Païk : « humaniser la technologie et le support électronique qui progressent rapidement, trop rapidement[1] ».

  • Appliquer deux postes télévisuels comme soutien-gorge : renvoyer le regardeur à lui-même.

  • Faire de Charlotte Moorman un émetteur de signaux télévisuels25.

 

[1]JONES Amelia et WARR Tracey, op. cit., page 179.

  • Orlan, Omniprésence, 1996.

  • Retransmission par satellites de ses opérations chirurgicales.

  • Provoquer le malaise et le dégoût chez les regardeurs.

  • Aussi proximité entre Orlan et ceux-ci : répond à leurs questions tout au long de l’intervention.

  • Pratique complètement artistique : atelier d’artiste pour la salle d’opération, dirige le remodelage de son visage[1]…

  • Interrogation des clichés de la beauté et du primat de la jeunesse. 

  • Fusion de l’humain à la technologie : quête du supra-humain et de l’être hybride.

 

[1]JONES Amelia et WARR Tracey, op. cit., page 185.

B. Le corps hybride.

  • Corps de l’artiste répondant aux nouvelles avancées techniques de la fin du XXe siècle.

  • But : rendre le corps humain toujours plus performant, résistant, fort.

  • Réponse des artistes s’engageant dans cette recherche. 

  • Donc suprématie de l’ère de la technologie permettant d’interroger la société.

  • Mais aussi : autres artistes émettant des limites. 

  • Atsuko Tanaka, Costume électrique, 1956, 2e exposition Gutaï, Oharan Kaikan, Tokyo.

  • Prestation scénique : esprit de Loïe Fuller (début du XIXe siècle).

  • Analogie entre les câbles électriques et les composantes du corps humain.

  • Costume renvoyant à la société traditionnelle japonaise (kimono technologique induisant le renouveau d’après guerre d’un pays profondément touché).

  • Sterlac, The Third Hand (La Troisième Main), 1976-1980, Tokyo.

  • Corps malmené par l’artiste dans ses recherches mécaniques et biologiques.

  • Mais refus d’être catégorisé comme un artiste sadomasochiste.

  • Inscription dans le concept de post-humanité : propos technologiques extrêmes.

  • Se servir des progrès techniques pour induire le corps humain dans un processus de mutation physique et absolu.

  • Sterlac, « Obsolete Body / Suspension / Sterlac », 1980 : « La seule évolution que je puisse entrevoir est […] de greffer la technologie sur le corps […]. Une technologie attachée en symbiose et implantée dans le corps crée une nouvelle synthèse, un hybride humain nouveau – l’organique et le synthétique s’unissent pour produire un nouveau type d’énergie[1]. »

 

[1]JONES Amelia et WARR Tracey, op. cit., page 184.

  • Inscription du corps dans la technologie : tendre vers une autosuffisance de celui-ci à long terme.

  • Heli Rekula, Hyperventilation, 1993 :

  • Autosuffisance menant à l’enferment du corps et de l’être sur lui-même.

  • Implicitement : excès du traitement technologique menant à une rupture entre les individus et le monde. 

C. La dépendance technologique pour repousser le prisme de la mort.

  • Précédemment : Orlan induisant cette perspective dans ses vidéos d’opérations chirurgicales.

  • Mort : poids pesant sur la société (guerres, virus du Sida dès les années 1980 résultant des amours libres de la décennie des années 1970…).

  • Traitement soit de manière frontale soit de manière poétique.

  • Impuissance de la science à accéder à l’éternité.

  • Photographies de Bob Flanagan à l’hôpital (en 1984 et en 1992) :

  • Artiste atteint de la mucoviscidose : maladie incurable. 

  • Utilisation d’instruments chirurgicaux pour décharger sa souffrance tout en assouvissant son penchant sadomasochiste.

  • Donc « érotisme médical[1] ».

  • Ne pas tomber dans l’apitoiement et le désespoir. 

 

[1]BAQUÉ Dominique, op. cit., page 134.

Marc Quinn, Self (Moi), 1991, Sang, acier inoxydable, Plexiglas, système de réfrigération, 208 x 63 x 64 cm

  • Prisme poétique du traitement de la mort : Marc Quinn, Self (Moi), 1991.

« Autoportrait ultime[1] ».

  • Sculpture ne pouvant perdurer dans le temps que par réfrigération : composée de 4. 5 litres de sang de l’artiste.

  • Inclure idée de décomposition suspendue du corps (figer pour conserver). 

  • Donc : inscription de son patrimoine génétique et des données scientifiques qui le composent.

  • Résidus du corps organique présents mais intégralité et spiritualité absente.

 

[1]JONES Amelia et WARR Tracey, op. cit., page 175.

CONCLUSION

Alyce Mahon note dans son ouvrage Eroticism and artune généralité qui s’applique au corps de l’artiste dans l’art depuis les années 1960 : il s’agit en tout et pour tout d’un « agent of political dissent[1] », autrement dit, « un agent de la dissidence politique ».

 

En effet, le corps de l’artiste abolit toute forme de traditionalisme jusqu’ici en vigueur, ou du moins bouleverse pour mieux proposer des alternatives. Il résulte d’une incompréhension du fonctionnement de sa société, conjointement à celui du domaine de l’art. Si cette dernière doit se reconstruire après la Seconde Guerre mondiale, elle est obligée de prendre en compte les traumatismes, les revendications, l’émergence de nouveaux moyens d’expression… C’est pourquoi, le corps – cette entité par laquelle se créent nos émotions et nos sensations – couplé à la figure de l’artiste devient le vecteur premier de ruptures. Son statut de nouveau médium lui confère la capacité de défendre une idéologie propre applicable et souvent critique envers un contexte historique, économique, sociale ou encore culturel. Mais il peut également être le support d’expérimentations, qu’elles soient davantage psychiques ou bien physiques, celles-ci impliquées dans la recherche technologique. Le tout ayant pour but de se faire miroir fidèle des changements et des progrès qui s’opèrent quelque soit l’aire chronologique, géographique ou thématique : c’est un ensemble qui s’articule et se répond au fur et à mesure des années, dans un contexte de mondialisation et d’échanges permanents.

 

Par ailleurs, nous ne pouvons passer à côté d’un point essentiel mis en avant par ces artistes de l’art corporel. Tous insistent par le biais de leurs performances ou de leurs créations sur le fait que nous prenions conscience de notre propre corps. Et d’un corps, principalement, qui renoue avec l’essence et l’origine de l’être humain : son environnement naturel. Dennis Oppenheim dans Parall Stress(Tension parallèle) en 1970 suggère déjà cette idée. D’une part il est le représentant de ce trouble avec le milieu industriel avant d’épouser de tout son corps la sinuosité d’un amas de cailloux. Cette quasi-assimilation art corporel/land art se poursuit par exemple chez Ana Mendieta. Un cliché de la série « Silueta » datant de 1988 fait écho à la célébration de l’existence prônée par l’artiste (comme dans Traces corporellesde 1974) avec la réutilisation de la couleur rouge signifiant inéluctablement la vie mais aussi la mort, la déliquescence. Elle a d’ailleurs déclaré : « J’ai réalisé un dialogue entre le paysage et le corps féminin (à partir de ma propre empreinte). […] Je deviens prolongement de la nature et la nature un prolongement de mon corps. Cette affirmation obsessionnelle de mes liens avec la terre est vraiment la réactivation de croyances primitives […] en une force féminine omniprésente. Cette absorption dans le sein maternel est une manifestation de ma soif d’être[2]. »

Le corps comme retour aux origines et comme porteur de nos caractéristiques innées est donc prégnant. 

 

 

Enfin, le corps de l’artiste comme nouvel outil d’expression directe n’est pas uniquement l’apanage de la fin du XXe siècle. Le couple emblématique EVA & ADÈLE revendiquant sa gémellité et son hermaphrodisme permet au regardeur de s’interroger sur son genre, sa sexualité et sur les stéréotypes. Les années 2010 ont effectivement vu émerger plus massivement, après de longues macérations, la théorie du genre qui suppose une redéfinition du carcan culturel et social passant par l’abolition de prétendus objets et comportements dédiés et incarnés par le masculin ou le féminin, excluant toutes autres formes de comportements en-dehors de ce schéma binaire. La production de ces deux artistes, à la fois intimiste et chargée d’engagement politique pour œuvrer à une reconnaissance de la liberté sexuelle et de genre dans la continuité et l’aboutissement des années 1960-1970, fusionne de ce fait la vie et l’art tout comme la poésie corporelle de Tino Sehgal, actuellement au Palais de Tokyo. 

Sa double facette d’artiste-chorégraphe l’inscrit dans la lignée des pratiques de la performance nées au sein du théâtre et du domaine de la danse dès les années 1960 (Yvonne Rainer, Trio A (The Mind is a Muscle, Part I)en 1966 ; Merce Cunningham). Le corps dépasse sa fonction de nouveau médium dans la peinture pour se muter en nouveau moyen de communication : il s’applique / s’étend ainsi à tous les champs artistiques. « Carte blanche à Tino Sehgal » met en interaction le corps des protagonistes et celui du visiteur pour finalement opérer une synthèse poétique et fortuite nous invitant à exprimer nos sensations et nos réflexions dans une expérience désinhibante. Dématérialiser et briser l’espace du musée se font analogues à la propre dématérialisation et fracture de notre corps et de notre esprit : chaque partie de nous s’arrête sur une question posée par un des intervenants pour mieux fusionner et acquérir une nouvelle vision introspective et rétrospective de notre existence. Le but étant de faire du corps le réceptacle sensible d’une perpétuelle remise en cause.

 

Dans chacun des deux cas suivants, nous noterons que les artistes entretiennent un rapport particulier avec le marché de l’art. EVA & ADÈLE ne tirent de profits que par le biais de la labellisation de slogans et de leur logo afin de poursuivre leurs créations et leur objectif politique. Tandis que Tino Sehgal n’a jamais effectué de contrats pour vendre ses œuvres : il passe un accord oral juridique qui stipule seulement la réinterprétation de ses performances.

Le corps de l’artiste ou pensé par l’artiste, au XXIe siècle, sort donc complètement du circuit mercantile et consumériste afin d’exposer sa poétique inhérente. 

 

[1]MAHON Alyce, op. cit.

[2]JONES Amelia et WARR Tracey, op. cit., page 168 (Ana Mendieta, citée dans K. Horsfled, B. Muller et N. Garcia Ferraz, Ana Mendieta : Fuego de Terra, 1988).

Dennis Oppenheim, Parall Stress (Tension parallèle), 1970 

BIBLIOGRAPHIE

BAQUÉ Dominique, Mauvais Genre(s) : Érotisme, pornographie, art contemporain, Paris, Éditions du Regard, 2002.

  

DAGEN Philippe, L’art dans le monde de 1960 à nos jours, Paris, Éditions Hazan, 2012.

 

JONES Amelia et WARR Tracey, Le corps de l’artiste, Paris, Phaidon, 20112.

 

LORD Catherine et MEYER Richard, Art & Queer Culture, New York, Phaidon Press Limited, 2013.

 

MAHON Alyce, Eroticism and art, New-York, Oxford University Press, 2005, format E-book.

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